Marguerite de Valois-Angoulème, Princesse d'Orléans, est la sœur aînée de François Ier. Après ses deux mariages successifs, elle sera appelée Marguerite
d’Alençon et Marguerite de Navarre. C'est surtout sous ce dernier nom qu'elle est connue pour son œuvre littéraire, abondante et originale, tant en prose qu'en poésie.
Cette œuvre est marquée par le courant évangélique qui prône un retour à l'authenticité des textes bibliques et l'intériorité de la foi dans un rapport personnel avec Dieu.
Avec le soutien de son frère, dans la première partie de son règne, Marguerite protège les écrivains et les théologiens réformateurs, mais ses positions religieuses la rendent suspecte aux yeux de la Sorbonne. Après l'affaire du "placard contre la messe", en 1534, François Ier entreprend de combattre le mouvement de la Réforme. L'influence politique de Marguerite s'affaiblit, mais elle ne renonce pas à son rôle de protectrice des Lettres.
Maurice Scève et Marguerite de Navarre ont pu se rencontrer à Lyon lors des fréquents séjours de la cour. Il est difficile de dire si, et jusqu'où, Scève a partagé les sympathies évangéliques de Marguerite de Navarre.
Délie donne quelques maigres indices sur les positions religieuses de Maurice Scève. Les références à la Bible sont surtout prises à l'Ancien Testament. Dans un dizain, Scève fait allusion à la disparition, la même année (1536), d'Érasme et de Lefèvre d'Étaples, traducteur de la Bible en français, qui fut inquiété par la Sorbonne pour ses idées novatrices en matière d'exégèse et protégé toute sa vie par Marguerite de Navarre.
Deux dizains de Délie traduisent l'admiration et l'estime de Scève pour Marguerite de Navarre. Dans l'un d'eux, la princesse est présentée comme une royale incarnation des vertus de Foi, Espérance et Charité, avec un ton qui va au-delà de l'éloge courtisan.
Si le blanc pur est Foi immaculée,
Et le vert gai est joyeuse Espérance,
Le rouge ardent, par couleur simulée,
De Charité est la signifiance ;
Et si ces trois de diverses substance,
Chacune en soi, ont vertu spéciale,
Vertu étant divinement Royale,
Où pourra-t-on, selon leur haut mérite,
Les allier en leur puissance égale,
Sinon en une et seule Marguerite ?
Délie, dizain CCLIV
En 1547, Jean de Tournes imprima un recueil d’œuvres de Marguerite de Navarre, sous le titre Les Marguerites de la Marguerite des Princesses. On y trouve un sonnet d'hommage écrit par Maurice Scève où il joue avec les différents sens du mot marguerite dont l'équivalent grec signifie perle. Les Marguerites de la Marguerite des Princesses sont en fait les Perles de la Perle des Princesses.
Les Marguerites eurent une Suyte publiée par Jean de Tournes cette même année 1547 pour laquelle Scève donna un autre sonnet, dédié cette fois à la fille de Marguerite, la princesse Jeanne, infante de Navarre, la future mère du roi Henri IV.
Dans ce second recueil, figure en première place L'Histoire des Satyres et Nymphes de Dyane (aussi connue sous le titre la Fable du faux Cuyder). Le texte est illustré d'un bois gravé dessiné par Bernard Salomon.
Dans Saulsaye Maurice Scève reprend à sa façon l'histoire des nymphes et on y retrouve l'estampe du Petit Bernard, sans que l'on sache quelle version a précédé l'autre. Mais cette double rencontre d'un texte et d'une image témoigne que les chemins de Maurice Scève et Marguerite de Navarre ont pu se sont croiser, dans l'atelier de Jean de Tournes.
Lien vers la Suyte des MARGVERITES de la Margverite des Princesses,
très illvstre royne de Navarre
sur le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France